Pharmaciens en France : défis, transformations et nouvelles missions
Estimation du temps de lecture : 15min
La profession de pharmacien en France est en pleine mutation. Entre la baisse des effectifs, les défis économiques et l’élargissement des missions, les pharmaciens doivent constamment s’adapter. Cet article explore les tendances démographiques, les nouvelles responsabilités et les défis financiers auxquels fait face la profession. Il met en lumière l’importance des pharmaciens dans le système de santé français, notamment à travers leurs rôles dans prévention et les soins de proximité.
Évolution du nombre de pharmaciens en activité en France
Selon la Drees, 73 381 pharmaciens exerçaient en France en 2023. Leur nombre est en baisse depuis sept ans à raison de 160 pharmaciens en moins par an en moyenne.
Les projections de la Drees montrent des effectifs en très forte hausse. Leur nombre va d’abord connaître une légère baisse jusqu’en 2027 puis une forte hausse de plus de 10% en 2050. Ils seraient ainsi près de 81 milles pharmaciens d’ici 25 ans.
Cette baisse des effectifs de 0,3% en 10 ans cache des dynamiques différentes selon les modes d’exercice. Ainsi, sur cette période, le nombre de pharmaciens qui exercent en libéral chute de 11% (leur part passe de 43 à 39%), tandis que les pharmaciens hospitaliers et salariés sont respectivement 11% et 5% plus nombreux.
Les secteurs d’activités des pharmaciens restent relativement stables ces dernières années. Près de 7 pharmaciens sur 10 exercent ainsi dans les officines, et 10% d’entre eux dans les hôpitaux publics.
En nombre, les hôpitaux publics ont attiré 20% de pharmaciens en plus, au détriment des laboratoires de biologie médicale qui, confrontés aux mouvements de concentration, en perdent 28%.
Les pharmacies d’officine accueillent des effectifs en légère baisse (-1%). Leur nombre (20 142 en 2022) est également en baisse de 10% sur dix ans. Restructuration du réseau d’officines oblige, la même tendance est observée chez les pharmaciens titulaires d’officine qui sont 10% moins nombreux qu’il y a dix ans. On en dénombrait ainsi 24 913 en 2022 contre 27 594 dix ans plutôt.
Les profils d’âge et de sexe restent stables
L’âge moyen des pharmaciens est de 46,7 ans. Il est resté stable ces 10 dernières années. Celui des pharmaciens titulaires d’officine est de 49,6 ans.
Le sexratio est stable où les femmes restent toujours majoritaires et représentent 2/3 des effectifs de la profession. Contrairement aux hommes (-2,7% en 10 ans), le nombre de pharmaciennes connaît une légère hausse de 1% en 10 ans.
Manque d’attractivité et modèle économique fragilisé
Comme pour les autres études médicales, le numerus clausus a été supprimé depuis 2021 pour les études en pharmacie. Néanmoins, les syndicats de pharmaciens, l’Ordre des pharmaciens ainsi que les associations d’étudiants ont tiré la sonnette d’alarme. En 2023, 471 places en deuxième année d’études de pharmacie sont restées vacantes dans les universités françaises. C’est certes moins que les 1000 places vacantes de 2022, mais le constat est alarmant : la profession ne fait plus rêver les jeunes. Cela a des répercussions sur le renouvellement de la profession puisque bon nombre de titulaires d’officines ne retrouvent pas de repreneurs lors du départ en retraite.
Les difficultés financières sont également derrière les fermetures d’officines. Après les années Covid exceptionnelles, la croissance a fortement ralenti et les volumes ont reculé selon le cabinet Iqvia. Certes le chiffre d’affaires est en progression mais il ne compense pas les charges de plus en plus élevées, notamment les charges salariales dues à la pénurie de collaborateurs obligeant les titulaires d’officines à rémunérer plus que la grille salariale. Ces difficultés de recrutement obligent certaines officines à travailler dans l’illégalité. En effet, en France un titulaire doit avoir un adjoint à partir de 1,3 million d’euros de chiffre d’affaires (un deuxième à partir de 2,6 millions d’euros). Selon Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France, il manquerait au secteur 15 000 pharmaciens.
Densité des pharmacies d’officines en berne
La France compte en moyenne 30 officines pour 100 000 habitants, contre 34 il y a dix ans. Des disparités régionales demeurent puisque 32% des départements sont en dessous de la moyenne nationale. De plus, sur les près de 35 milles communes, près de 5% d’entre elles (1701) n’ont pas de pharmacie d’officine alors qu’elles disposent d’un nombre suffisant d’habitants.
Les officines continuent néanmoins d’assurer un réseau de proximité sur tout le territoire puisque 35 % d’entre elles se situent dans des communes de moins de 5 000 habitants.
Profession aux missions élargies
Les missions des pharmaciens d’officine ont considérablement évolué pour répondre aux nouveaux défis de santé publique et aux besoins des patients.
Depuis 2019, ils participent aux actions de prévention des maladies cardiovasculaires et du diabète et administrent le vaccin contre la grippe (aux personnes de plus de 11 ans). Cette mission a été élargie à la vaccination contre la Covid-19 lors de la pandémie de 2021. Depuis juin 2021, ils peuvent également réaliser des tests rapides d’orientation diagnostique (TROD) pour l’angine et mettre en place des actes de télésoin.
La Convention nationale des pharmaciens signée en 2022 et les arrêtés qui ont suivi en 2023 et 2024 ont continué d’enrichir les missions des pharmaciens d’officine. Ils peuvent administrer des rappels vaccinaux ; assister les patients lors des téléconsultations avec des médecins ; dépister les maladies cardiovasculaires, le diabète, le cancer colorectal et la cystite ; délivrer de façon exceptionnelle une boîte de médicament d’un traitement au long cours (> 3 mois) d’une maladie chronique (hypertension, diabète, thyroïde) au porteur d’une ordonnance récemment périmée permettant ainsi la continuité des soins. Ils sont autorisés à délivrer sans prescription d’un médecin des antibiotiques en cas d’angine ou d’infection urinaire.
Sources :